Commençons par une anecdote. Un camarade comédien en passe d’arrêter le métier faute de contrat, décide d’adapter le roman Réparer les vivants de Maylis de Kerangal.
Il répète dans son salon.
Il présente son travail dans un théâtre pour une audition.
Il jouera son spectacle pendant plusieurs années…
De quoi a-t-il eu besoin pour travailler ? D’un texte, ici un roman. D’un espace, son salon. Et de temps, le sien.
Pas de décor, un peu de lumière, beaucoup d’envie.
Des histoires comme ça il en existe plein.
Presque banal me direz-vous, mais pas si simple à mettre en œuvre. Ce qu’avait compris cet ami, c’est qu’il était le maitre de l’espace et du temps de l’œuvre qu’il était en train de créer. Il a « fait avec » ce qu’il avait…ici et maintenant.
Je vous propose pendant les deux semaines de chantier, de construire ensemble, « ici et maintenant » une petite forme, un spectacle fabriqué avec toutes les contraintes, d’espace, de temps, qui souvent sont des freins à notre création, pour en faire au contraire un moteur dans notre travail.
Je souhaite pour cela que nous répétions « vite et mal » pour reprendre une formule chère à Antoine Vitez. Nombres d’actrices et d’acteurs peuvent témoigner que lors de raccord ou « d’italiennes » entre camarades, jaillit parfois en toute simplicité des morceaux de scène, des répliques, qui dites un peu vite et un peu mal, prenaient tout à coup un goût, une épaisseur, ou un sens, bien plus fort que ce que la mise en scène imposait. Comme si, parfois, vouloir bien faire, avec sérieux, et volontarisme contrariait notre geste artistique.
Nous chercherons ensemble une manière de répéter « vite », qui laisse jaillir des formes plus urgentes, plus nécessaires. Plus intuitives aussi, fabriquées avec peu d’éléments, et reposant uniquement sur le travail des actrices, et des acteurs.
Je vous proposerai un corpus de textes composé de solos et de duos, mais que vous pourrez compléter en fonction de vos envies. Ces textes ont presque tous la particularité d’être en adresse direct au public, adresse que nous travaillerons de manière très précise à partir d’exercices.
Le travail se divisera en deux semaines.
En mars, vous choisirez un texte, ou un thème et nous construirons ensemble les fondations de ce travail.
À l’issue de la première semaine tout le monde repartira avec un texte et une base pour que chacune.e puisse continuer à répéter seul.e ou à deux.
Et nous nous retrouverons au mois de mai pour continuer ensemble la recherche et pourquoi pas, présenter une petite forme à l’issue de cette dernière semaine de travail ensemble.
Allons-y joyeusement « vite et mal » !
Emmanuel Vérité