L’avenir est à ceux qui n’ont pas peur du vide - Vaudeville Contemporain 

« L’avenir est à ceux qui n’ont pas peur du vide » Valère Novarina

On se rencontre en 2019, on vient à priori de théâtres assez différents, on n’est pas les mêmes animaux comme on dit, mais on se rend vite compte qu’on a un attachement commun à une certaine manière, assez brute peut-être, de penser et d’être au monde où rien ne va de soi. Et, surtout, on se sent rélié.e.s dans un rapport existentiel à l’humour dont on décide de faire recherche commune, notamment autour de la création de Jacqueline Écrits d’Art Bruts. 

Et, malgré la gravité, l’austérité apparente de ces textes qui expriment la souffrance et l’enfermement physique et psychique de leurs auteur.rice.s, il émane de leur radicalité énormément d’humour.

Mais de quoi rit-on ?

« Beckett définit son théâtre comme dévoilant  : « en face, le pire, jusqu’à ce qu’il fasse rire. » Loin de chercher la moquerie, la caricature, ou simplement une sorte de divertissement « qui fait diversion », il s’agissait alors de convoquer le rire et son caractère profondément humain, celui qui renvoie à l’absurdité de la condition humaine, cette fonction indispensable pour assumer notre présence et y survivre.

Le travail de jeu a demandé d’aller chercher dans une sensibilité et une porosité au monde, dans une grande sincérité, mais aussi de nourrir constamment son imaginaire, d’aller creuser dans son intériorité afin d’éviter un jeu démonstratif et que l’excessif, le grotesque provienne de ce qui est actif à l’intérieur.

Jean Oury, grand psychiatre, définissait l'humour en disant : “c'est le sérieux, multiplié par le précaire ».

L’idée du chantier serait de poursuivre joyeusement cette recherche et de mettre en partage des outils qui nous inspirent et qui nous ont été transmis notamment par Alain Reynaud, Heinzi Lorenzen et Alain Gautré. Nous aimerions que ce travail se fasse à partir de textes écrits par plusieurs auteur.rice.s contemporain.e.s afin de pouvoir explorer plusieurs univers, plusieurs langues, plusieurs parti pris.

Le chantier s’articulera en plusieurs temps :

Des moments de recherches, de travail d’écoute, de rythme, de partage d’outils concrets ; puis une recherche plus concentrée sur les textes où il sera question de creuser des enjeux personnels et universels puissants pour accéder à une certaine sincérité au plateau, et aussi de déceler, à travers l’articulation d’une écriture, d’une scène, les mécanismes qui rendent comique une situation.

Évidemment, il s’agit avant tout pour nous d’ouvrir un temps de tentatives, d’exploration de tous les possibles dans un climat d’échanges, de rencontres, et de bienveillance.

« Rire est un rapt, un suicide court, un raptus. Le rire vient enlever. Les grands acteurs comiques pratiquent le retrait, ôtent publiquement leur visage. L'acteur comique pratique l’exercice spirituel d’abaissement : il va au sol, chute, avec humilité ; il abaisse Adam, le rend à la terre : adamah. Le grand acteur comique vient toujours évider encore plus la figure humaine. » Valère Novarina

Alice Vannier et Olivier Martin Salvan